Issues des anciennes orientations d’aménagement intégrées dans les projets d’aménagement et de développement durable (PADD) des plans locaux d’urbanisme (PLU) qui traduisaient les grands principes d’aménagement souhaités par la collectivité dans ses différents volets (économique, environnemental, agricole, déplacements…), les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) sont devenues un dispositif autonome avec l’entrée en vigueur de la loi ENE du 12 juillet 2010 (loi dite « Grenelle II »).

Michel Loussouarn, bureau avocat

Au même titre que le rapport de présentation, le PADD et le règlement, les OAP constituent désormais un des éléments composant le PLU (article L. 151-2 du code de l’urbanisme).

Le PADD exposant les principes généraux d’aménagement d’un territoire (communal ou intercommunal), les autres documents qui composent le PLU ont vocation à décliner ces principes de manière plus opérationnelle. Ainsi, le règlement des zones détermine précisément les conditions d’occupation des sols tandis que les OAP encadrent dans l’espace, et le cas échéant dans le temps, l’aménagement d’un secteur déterminé.

Les OAP sont donc un instrument de mise en œuvre du PADD. C’est ce qu’énonce l’article L. 151-6 alinéa 1er du code de l’urbanisme :

« Les orientations d’aménagement et de programmation comprennent, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durables, des dispositions portant sur l’aménagement, l’habitat, les transports, les déplacements et, en zone de montagne, sur les unités touristiques nouvelles. (…) ».

Il existe donc nécessairement un « lien de subordination » des OAP envers le PADD. Plus exactement, les OAP doivent être compatibles avec le contenu du PADD.

Ainsi, la Cour administrative de Lyon a  rappelé que la cohérence entre le PADD et une OAP doit s’apprécier globalement à l’échelle du secteur qu’elle entend régir. Aussi, le fait qu’une disposition de l’OAP puisse être divergente d’un élément du PADD pour une partie limitée du secteur considéré ne suffit pas à caractériser l’absence de cohérence globale avec le PADD (CAA Lyon, 13 février 2018, req. n° 16LY00375).

S’agissant de leur contenu, l’article L. 151-7 du code de l’urbanisme prévoit notamment que les OAP peuvent « prendre la forme de schémas d’aménagement et préciser les principales caractéristiques des voies et espaces publics ».

De plus, l’article L. 152-1 du code de l’urbanisme pose le principe que « tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d’installations classées » doivent être conformes au règlement du PLU et à ses documents graphiques, mais ils doivent être « en outre, compatibles, lorsqu’elles existent, avec les orientations d’aménagement et de programmation. »

En principe, quand un projet de construction n’est pas compatible – c’est-à-dire quand il existe une contrariété entre ses caractéristiques et les dispositions d’une OAP –, il se voyait essuyé un refus par l’administration. Tel est le cas des OAP relatives à de futures voies de desserte sur l’emprise desquelles est sollicitée une construction :

  • Refus d’un permis de construire pour une maison d’habitation dont l’emprise était prévue sur des parcelles devant accueillir la voie de desserte d’un lotissement à créer selon le plan de l’OAP (Cour administrative d’appel de Nancy, 16 mai 2013, Cne de Compertrix, req. n° 12NC01800) ;
  • Annulation d’un permis d’aménager prévoyant un tracé sinueux de la voie primaire d’un lotissement alors que l’OAP prévoyait un tracé rectiligne (CAA Bordeaux, 10 juillet 2014, Sté Ranchère, req. n° 13BX00235) ;

Cependant, il faut souligner que le juge apprécie l’obligation de compatibilité entre une autorisation d’urbanisme et une OAP à l’aune du degré de précision de cette dernière (Conseil d’Etat, 26 mai 2010, Dos Santos, n° 320780). Ainsi, pour être opposables, les dispositions d’une OAP doivent être suffisamment détaillées et précises dans leur substance, ce qui oblige à les confirmer et à les décliner par les éléments « en dur » du PLU :

  • C’est le cas des tracés de voirie mentionnés par une OAP qui doivent être matérialisés par un emplacement réservé (CE, 8 novembre 2017, Saucié, req. n° 402511).
  • Le refus d’un permis est légitime du fait que le « projet de construction d’une maison individuelle se situe à un endroit où devrait être mise en place une voie de desserte au profit d’une nouvelle zone d’habitation définie dans le cadre d’une orientation d’aménagement et de programmation qui fait partie intégrante du document local d’urbanisme, et pour laquelle un emplacement réservé a été constitué » (CAA Nantes, 20 mai 2016, Cne de Boullay-Thiéry, req. n° 15NT01153).

A l’inverse, n’est pas opposable à un permis une OAP prévoyant « un cheminement piéton sur parcelle privée à créer ou à rendre accessible au public » sans que le tracé de cette voie piétonne n’ait été précisé par le règlement ou matérialisé par un emplacement réservé (TA Melun, 10 février 2017, req. n° 1407193).

A défaut de ces précisions/confirmations par le règlement du PLU, notamment par des emplacements réservés mentionnés au document graphique, une telle OAP est insusceptible de créer des obligations pour le propriétaire d’un terrain et ne constitue qu’une simple prévision d’aménagement qui ne peut faire l’objet d’un recours en annulation puisqu’elle est sans conséquence pratique.

En définitive, il est possible de distinguer deux catégories d’OAP :

  • Des OAP « opérationnelles » qui, suffisamment détaillées, sont opposables aux demandes d’autorisation d’urbanisme ;
  • Des OAP « d’intention » qui exposent un parti pris d’aménagement de manière générale, en complément du PADD, mais qui faute de précisions suffisantes sur le projet d’aménagement sont dépourvues de force contraignante à l’égard des pétitionnaires.